Panique woke en librairie
Edit : Des lecteurs attentifs ont signalé depuis la publication de ce texte hier soir que j’avais oublié quelques essais dans cette petite collection de marginaux iconoclastes. Mon propos était de souligner qu’il existe quelques lanceurs d’alertes qui, soutenus par de rares médias et éditeurs, osent s’opposer au torrent indigéniste de un livre traduit en 2020 qui inonde le débat public. Mea culpa aux oubliés de ce petit inventaire. Leur combat ne sera pas oublié.
De Rachel Khan à Lydia Guirous, de Mathieu Bock-Côté à Mohamed Sifaoui, les essais se multiplient depuis le début de l’année 2021 pour dénoncer la noyade du débat public sous les innombrables publications “décoloniales” et “racialistes” faisant monter une nouvelle forme de censure. Les Éditions de l’Observatoire ont, à elles seules, publié pas moins de 5 essais sur le sujet, rien que sur le mois de mars 2021 : Les déraisons modernes, de Perrine Simon-Nahum, Racée, de Rachel Khan, Insoumission Française, de Sonia Mabrouk, La Culture nous Sauvera, de Christophe Tardieu et David Lisnard, et Les Fossoyeurs de la République, de Mohamed Sifaoui. Si on y rajoute Assimilation : En Finir avec un Tabou Français, de Lydia Guirous, et Le Séparatisme Islamiste, de Gérald Darmanin, qui sont certes parus en février, mais couvrent des thèmes similaires, cela représente une manne de 7 ouvrages sur les mêmes thèmes : “décolonialisme”, “racialisme”, et “cancel culture”, réutilisant de manière à peu près interchangeable les mêmes anecdotes pour attaquer de manière uniforme le même ennemi, à savoir une alliance composée de syndicalistes, de féministes, de baba-cools des départements de Lettres, et d’islamistes. Il faudrait peut-être y ajouter La Révolution Racialiste, de Mathieu Bock-Côté, Pas Une Goutte de Sang Français, de Manuel Valls, et Les Rien-Pensants, d’Elisabeth Lévy* (mais ils n’ont pas été publiés aux Éditions de l’Observatoire), et certainement d’autre essais oubliés ici “coup de poing” où des éditorialistes, journalistes, politiciens et intellectuels publics “rebelles” (et occupant régulièrement les plateaux télé) “tirent la sonnette d’alarme” sur “la montée de l’indigénisme” qu’eux seuls ont su, contre vents et marées, percevoir.
La concurrence est devenue si rude que certains de ces auteurs n’ont même pas (encore) eu l’honneur des plateaux : on peut regretter que le livre de Mohamed Sifaoui soit par exemple pour l’instant plutôt confidentiel, dans la mesure où il contient sans doute un regard particulièrement original sur le sujet, par rapport aux autres ouvrages ayant bénéficié d’une couverture plus large sur ces sujets. Les ouvrages relevant du fameux “indigéno-racialisme de la cancel culture” ont été, sagement, mis à part par les médias, et semble-t-il également par les maisons d’édition : la bête noire de ces ouvrages (en tout cas, le seul livre qu’ils citent occasionnellement), la traduction française de Fragilité Blanche, de la sociologue (et consultante RH excessivement bien rémunérée pour l’organisation de séminaires corporate) Robin DiAngelo, remonte à presque un an. On citerait volontiers d’autres exemples, mais les nombreuses tribunes à ce sujet évitent soigneusement de citer les titres des apparemment innombrables ouvrages défendant une vision “racialiste” de la société. Certainement pour préserver les crédules lecteurs de leurs pages empoisonnées.
Sur la même période, il faudrait faire le décompte des Unes consacrées à “la folie des campus”, aux “nouveaux censeurs”, au “totalitarisme qui vient”, et à “la cancel culture”, des tribunes accordées aux courageux dénonciateurs de ces phénomènes : le collectif Vigilance Universités décompte seulement cinq tribunes sur sa page web depuis le début de l’année, contre une dizaine sur le seul site du Point pour son organisation-soeur, l’Observatoire (aucun lien de parenté) du Décolonialisme (site en réalité adossé à aucun programme de recherche scientifique, et seulement à un blog Wordpress). Mais il faut y ajouter les articles, débats, éditoriaux, prises de parole parlementaires, et autres interventions publiques, pour tenir l’inventaire de la faible parole qui parvient occasionnellement à percer quotidiennement sur des antennes nombreuses pour alerter la population de cette menace tout à fait nouvelle : les beatniks des campus ont parfois des idées un peu plus progressistes que la moyenne des éditorialistes français.
Heureusement, il restera possible, dans cette période où le discours décolonialiste et racialiste écrase tellement le débat public qu’il est partout, absolument partout, en tout cas dans un essai paru il y a un an d’une autrice largement critiquée par les militants antiracistes contemporains, d’entendre quelques voix discordantes. Ainsi, il sera possible pour Elisabeth Lévy de dialoguer avec Eric Zemmour ou Alain Finkielkraut du nouveau livre de Mohamed Sifaoui qui en discussion avec Manuel Valls et David Lisnard ose se lever pour dénoncer ce que déjà à l’époque Michel Houellebecq avait eu le courage, à l’inspiration bien sûr d’Eric Zemmour et de Pascal Bruckner (à moins que ce ne soit à celle de Caroline Fourest et d’Elisabeth Lévy ?), et en tout cas en accord avec tous les autres, d’appeler du même nom que les autres, comme ils l’avaient bien entendu déjà expliqué la veille, dans l’émission de l’un d’entre eux. A moins que ce ne soit dans un livre ?
*Je me suis trompé en écrivant ce post : il s’agit d’une réédition de l’ouvrage d’Elisabeth Lévy.